Une forme de prolongation de l’entrée précédente… Vieillir, c’est peut-être aussi atteindre l’âge où l’on commence à perdre ses proches en comprenant non seulement ce qui se passe et ce que ça signifie pour nous, mais aussi ce que ça signifie pour les autres. En l’occurrence, apprendre le décès d’un oncle qui n’avait pas soixante ans, et qui faisait partie de cette branche de la famille qui a quitté l’Italie dans les années 50 pour s’installer en France.
Le décès des grands-parents, dans l’enfance, c’est autre chose : on est trop jeune pour vraiment comprendre, et on se construit parfois des mécanismes de défense difficiles à défaire ensuite (ceux qui ont lu « Fantômes d’épingles », dans Notre-Dame-aux-Ecailles, comprendront peut-être de quoi je parle). Sans compter qu’on perçoit toujours ses grands-parents comme étant âgés par défaut. Ç’avait été un choc de découvrir adulte que ma grand-mère paternelle était morte si jeune, à cinquante-neuf ans.
Je n’avais revu mon oncle que deux fois depuis l’annonce de sa maladie. Je ne l’avais pris en photo qu’une seule fois, en janvier de cette année, juste après la naissance de sa petite-fille, et je tiens beaucoup à cette photo. Je ne garde paradoxalement de ces moments-là que des souvenirs chaleureux : des discussions sur la cuisine (quoi de plus normal quand on réunit une famille italienne ?) ou encore sur Assassin’s Creed dont il était fan. J’ai pas mal médité récemment cette citation de Graham Joyce, tirée de Mémoires d’un maître faussaire : « When someone dies – someone you love – the world is a changed place. A distinctive light has gone out of the world. Nothing puts the world back as it was. » Je ne l’ai jamais trouvée aussi juste.