C’est toujours un immense plaisir de revoir sur scène John Parish et son groupe. J’étais particulièrement curieuse d’assister au concert d’hier au Batofar, qu’on annonçait surtout axé sur ses musiques de films – pas l’aspect le plus connu de son travail, mais sans doute un des plus intéressants. La BO de Rosie, film belge de Patrice Toye passé inaperçu chez nous en 1999, est de toute beauté. Si j’avais revu John l’an dernier aux côtés de PJ Harvey, la dernière tournée avec son groupe devait remonter à trois ou quatre ans. Au casting habituel – Marta Collica au clavier, Giorgia Poli à la basse, Jean-Marc Butty à la batterie – s’ajoutait le guitariste Jeremy Hogg, que je me rappelais avoir vu lors de la tournée Is this desire de PJ Harvey dont je garde un souvenir particulièrement ému.
L’intérêt de suivre un groupe sur la longueur, c’est celui de le voir évoluer, tester de nouvelles choses, trouver une formule ou bien s’en éloigner. Ce qui m’a frappée hier soir, ainsi que d’autres fans, c’est la dynamique particulière qu’insuffle le choix de la setlist, et l’énergie qui en résulte ou non. J’ai vu des concerts de John Parish un poil trop sages malgré la qualité des morceaux ; celui d’hier était tout simplement parfait. Équilibre idéal entre des morceaux inconnus qui savent immédiatement happer le spectateur (comme ce Spring ritual tiré d’un autre film de Patrice Toye, (N)iemand, inédit en France) et les classiques qui produisent toujours leur effet (Pretty Baby tiré de Rosie, joliment interprété par Marta Collica). Entre ceux qu’on connaît bien pour les avoir souvent entendus sur scène (Westward Airways ou mon préféré Sea defences) et ceux qu’on est tout ému d’entendre pour la première fois « en vrai ». Le grand moment de la soirée, pour moi, ce fut l’instrumental final de Rosie. Tout commence très doucement par une reprise du thème fragile et poignant qui parcourt la BO – j’avoue que ça m’a presque filé les larmes aux yeux – et puis le morceau s’emballe sur fond de guitares saturées, l’ensemble monte en puissance, le sol du Batofar se met à vibrer, et le moment est absolument parfait. J’ai toujours eu une tendresse particulière pour ce morceau sur disque ; le groupe a réussi à en rendre l’esprit tout en le revisitant différemment. Chapeau bas.
Cerise sur le gâteau, l’ambiance était particulièrement chaleureuse – et pas seulement à cause de la température un poil trop estivale (qui en poussa d’aucuns, dont je fus, à se réfugier sous un ventilateur près de la scène). Le public était très réactif, le dialogue avec le groupe s’est installé très vite, les amis parisiens de John et du groupe étaient venus en nombre (parmi lesquels Jesse Vernon et Kate Stables de Morningstar et This is the kit, qui firent une arrivée remarquée avec leur bonne humeur habituelle). S’y ajoutait le plaisir de retrouver les copains de concert, ceux qui suivent les mêmes groupes et avec qui on tisse un lien particulier à force de les côtoyer depuis dix ans dans les mêmes salles. En fin de soirée, tout ce beau monde s’attardait sur les quais en attendant le départ, discutant avec les musiciens autour de bières ou de mojitos. C’est toujours un plaisir trop rare de parler avec John Parish, Jean-Marc Butty ou Marta Collica, que j’apprécie autant en tant que personnes qu’en tant que musiciens. C’était un de ces moments simples et parfaits où tout est à sa place dans le monde, et où on est heureux d’être là, de suivre ces gens-là, d’avoir vu ce concert-là et partagé cette soirée avec eux.
(Et pour finir sur une anecdote totalement inutile : saviez-vous qu’au Batofar, quand vous entrez sur invitation, vous tamponne un Hello Kitty sur le bras ? On va dire que c’est très rock’n’roll.)