Alors voilà, j’ai 32 ans. J’ai déjà entendu dire par des gens plus âgés que moi que la décennie 30-40 était celles qu’ils avaient préférée. Je ne peux pas en dire autant pour l’instant. C’est vrai qu’on se sent plus serein passé la trentaine, on se connaît mieux et on sait mieux vers quoi on se dirige. En contrepartie, on n’a plus forcément cette énergie de la vingtaine qui poussait à aller de l’avant, on commence à se demander ce qu’on est en train de faire de sa vie, et les problèmes non résolus prennent de plus en plus de place. Moi qui ai une tendance naturelle assez forte à l’introspection et aux questions existentielles (ne me dites pas que ça ne se voit pas dans ce que j’écris), je dois dire que la trentaine n’a pas aidé. C’était peut-être l’effet « anniversaire imminent » mais certains vieux problèmes ont refait surface ces dernières semaines, encore plus fort que d’habitude. J’avais l’impression d’étouffer et de me retrouver isolée sans pouvoir en parler, même quand j’étais bien entourée. Et puis j’ai fait le ménage dans ma tête lors de la semaine qui vient de s’écouler. J’ai commencé à en parler et à aller vers les gens, et par effet boule de neige, j’ai l’impression d’avoir reçu énormément de bonnes ondes en retour. Il y a eu des moments précieux au cours de cette semaine, des échanges, des gestes, des conversations avec des amis, qui m’ont donné l’impression de pouvoir à nouveau avancer. Du coup, j’ai abordé les 32 ans plus sereinement et je me sens beaucoup plus légère que je ne l’étais lundi dernier.
Un petit plaisir tout bête au cours de cette semaine : avoir eu, pour la première fois depuis longtemps, l’occasion de cuisiner pour des amis. Je dis en blaguant que ce sont mes gènes italiens qui se réveillent (ou ma Bree Van De Kamp intérieure, au choix) mais c’est quelque chose que j’adore : passer un moment tranquille dans ma cuisine en écoutant de la musique, souvent David Bowie pour des raisons qui m’échappent, et en pensant aux gens pour qui je prépare ces plats. J’adore le côté manuel de la cuisine, que je trouve vraiment apaisant, et j’aime plus particulièrement la faire pour les autres. Je n’en ai pas souvent l’occasion, ne serait-ce que parce que je reçois assez peu chez moi. Avec un peu de chance, ça va changer – une de mes résolutions pour l’année à venir, c’est de trouver un nouvel appartement, moins sombre et plus adapté à recevoir des gens. Un deux pièces plutôt qu’un studio, dans l’idéal.
Sinon, parmi les bons souvenirs de la semaine écoulée… Je m’apprêtais à poster un lien vers une session Cargo à laquelle j’ai assisté jeudi et dont la mise en ligne est imminente, mais ça fera l’objet d’une prochaine entrée. Il s’agit cette fois de Howe Gelb, le big boss de Giant Sand dont j’ai déjà parlé ici. Je présente généralement Giant Sand comme « le groupe dont est issu Calexico« , ce n’est pas exactement ça même si Joey Burns et John Convertino ont été la section rythmique de Giant Sand il y a quelques années. Pour les gens qui s’intéressent au même type de musique que moi, tendance folk/blues/country américaine, Howe Gelb est une pointure – un type pas forcément très connu, mais extrêmement influent, doublé d’un découvreur de talents. Au cours de la session, tournée à l’arrière de son bus de tournée, il a d’ailleurs invité une autre personne à le rejoindre, la canadienne Lucie Idlout qui assurait sa première partie ainsi que les chœurs pendant le concert. Jolie voix, jolie présence, joli moment. Je reparlerai de tout ça quand la session sera en ligne. Le concert au Point FMR m’a moins impressionnée que d’autres concerts de Giant Sand que j’ai pu voir, mais c’est toujours quelque chose de voir Gelb sur scène, avec son air pince-sans-rire, son charisme tranquille et sa voix magnifique.
À propos de vidéos sur le Cargo, on me souffle que l’interview filmée d’Amanda Palmer pourrait être mise en ligne cette semaine, et la session de Jesse Sykes au Père-Lachaise dont j’ai déjà parlé vers mi-décembre.
À part ça, je rappelle que c’est ce mardi que je participe à la table ronde « Que sont les monstres devenus ? » avec Charlotte Bousquet, Sire Cédric, Justine Niogret, Nicolas Cluzeau et Jean Marigny, ça se passe à l’Ecole Estienne (18 boulevard Blanqui, métro Place d’Italie), venez nombreux.
Et samedi, autre événement à ne pas manquer, la dédicace de Francis Berthelot chez Scylla (8 rue Riesener, métro Montgallet) à l’occasion de la sortie de son roman Le petit cabaret des morts. Le roman s’inscrit dans une série baptisée le « Rêve du démiurge » mais chaque roman peut être lu indépendamment des précédents, même s’ils se répondent pas un certain nombre d’éléments récurrents. Pour ceux qui ne le connaissent pas, en plus d’être quelqu’un d’adorable qui devient carrément lyrique quand il parle de catch ou de séries télé (c’est lui qui m’a convertie à Buffy il y a quelques années), Francis est aussi un sacré écrivain. Il écrit des choses belles et poétiques, souvent extrêmement poignantes. J’ai été très marquée par Rivage des intouchables, qui met en scène l’apparition d’une épidémie sur une planète où cohabitent deux espèces séparées par un tabou, et derrière laquelle on ne peut que deviner le spectre du Sida. Et aussi par Nuit de colère, et par Le jongleur interrompu dont la fin m’a tellement prise à la gorge que j’ai failli ne pas pouvoir le terminer. Il aborde des sujets graves mais ses textes ne sont jamais pesants pour autant, et son écriture est vraiment magnifique.
Pour finir sur une note saisonnière, est-ce que j’ai déjà parlé ici du CD de chants de Noël lovecraftiens de la HPLHS, A very scary solstice ? Je pense que vous comprendrez le concept en allant jeter une oreille sur les extraits suivants : It’s beginning to look a lot like fish-men (que j’adore d’autant plus que la référence à la nouvelle « Le cauchemar d’Innsmouth », une de mes nouvelles préférées de Lovecraft, est transparente), The carol of the olde ones et Cthulhu lives. Plus de détails sur le CD ici. Personnellement, je suis fan.
Et à défaut de chambres d’hôtel ces temps-ci : autoportrait chez moi le soir de mes 32 ans.