Blog - page 28

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J’imaginais mal de ne pas évoquer ici la triste nouvelle, mais je ne me sens vraiment pas de développer. Ce serait peut-être maladroit, voire déplacé. On a appris ce samedi le décès de Jacques Mucchielli, co-auteur avec Léo Henry des recueils Yama Loka Terminus et Bara Yogoï, et bien connu notamment des habitués des librairies Charybde et Scylla où on le croisait souvent. Je n’ai pas les mots pour dire le choc, la tristesse et l’incrédulité partagés par ceux qui ont connu Jacques. L’ami Nébal, sur son blog, vous en parlera mieux que moi. Comme beaucoup, je pense très fort à ses proches et à l’épreuve qu’ils sont en train de traverser.

 

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Dystopiales en apesanteur

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J’ai sans doute déjà parlé ici du plaisir particulier, lorsqu’on est traducteur, qui consiste à devenir le passeur d’un texte. Le recueil de Lisa Tuttle, Ainsi naissent les fantômes, a été pour moi une expérience encore plus particulière à cet égard : la possibilité de mettre en avant le travail d’un auteur assez confidentiel mais dont le travail m’a énormément marquée, au point d’influencer nettement ma propre écriture. Mais je n’imaginais pas bien quel moment surréaliste ce serait de participer hier aux premières Dystopiales de la librairie Charybde en compagnie de Lisa et de me demander ce que j’aurais éprouvé, quand je découvrais ses textes à seize ou dix-sept ans, si l’on m’avait raconté cette soirée-là.

 

Ian McDonald, Jean-Daniel Brèque, Lucius Shepard

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Nicolas Fructus dédicaçant Le Dragon Griaule de Lucius Shepard

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Compte tenu de la belle brochette d’auteurs et d’illustrateurs présents, dont Ian McDonald et Lucius Shepard de passage en France pour quelques jours, je m’attendais à ce que la soirée attire pas mal de monde. Mais pas à ce qu’elle soit bondée à ce point. Il m’a semblé que tous les participants signaient à tour de bras toute la soirée. En tout cas, Lisa et moi, dans notre coin de la librairie, avons été très occupées. Entendre les gens lui dire à quel point ses textes les ont remués, puis la voir retrouver des connaissances pas revues depuis longtemps, a été très émouvant. D’autant que j’ai découvert qu’il s’agissait sans doute, pour autant qu’elle se souvienne, de sa toute première dédicace en France. Je suis ravie également que la soirée lui ait permis de rencontrer Nathalie Serval qui était sa traductrice attitrée sur les livres précédents. Je leur ai fait signer à toutes deux mon exemplaire du recueil Le Nid qui m’accompagne depuis l’adolescence. Autres petites joies de la soirée : signer Kadath pour Ian McDonald, ou rencontrer une lectrice qui m’apportait mes quatre livres à signer et m’a avoué qu’elle n’aimait pas les nouvelles avant de lire Serpentine.

 

J’ai eu le sentiment hier d’avoir contribué à mettre en marche une machine qui continue son petit bonhomme de chemin toute seule. Une rencontre a lieu entre des textes et des lecteurs, et l’accueil est au-delà de mes espérances. Par ailleurs, c’est toujours très agréable quand le courant passe autant avec la personne qu’avec l’écrivain ; j’apprécie d’être assez à l’aise avec Lisa pour pouvoir lui dire sans aucune gêne que ses textes m’ont marquée ou que j’ai versé une larme en traduisant sa nouvelle « Le Remède ». Mais aussi pour pouvoir discuter de tout et n’importe quoi lors d’un trajet en taxi, le plus naturellement du monde. Quand je repense à la lectrice que j’étais à seize ans et qui n’imaginait même pas croiser un jour sa route, je ne peux pas m’empêcher de trouver tout ça surréaliste. En tout cas, je suis ravie de ces deux jours passés en sa présence et de la franche réussite qu’on été ces premières Dystopiales. Un immense merci à tous ceux qui sont passés nous voir.

 

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Utopiales, cuvée 2011

 

Retour des Utopiales de Nantes, avant d’enchaîner demain avec une dédicace que j’attends impatiemment : à partir de 17h, je serai à la librairie Charybde (129 rue de Charenton, 75012) en compagnie de Lisa Tuttle, Lucius Shepard, Ian McDonald, Jean-Marc Agrati, Léo Henry, Jacques Mucchielli, Jean-Daniel Brèque, Nicolas Fructus et Laurent Rivelaygue. Belle brochette, et une occasion rare de croiser Lisa Tuttle en dédicace par chez nous.

 

Les Utopiales, donc. Toujours le même cocktail d’une année sur l’autre : les rencontres et les retrouvailles, les gens qui vous disent « on se voit dans cinq minutes » et qu’on ne recroise jamais, les dédicaces sur un coin de table au fond du bar, les discussions impromptues avec des lecteurs dans les recoins du même bar, les expos qu’on traverse de nuit avant la fermeture des lieux (celle consacrée à l’univers déjanté du Dr Grodbort valait particulièrement le détour), les fous rires avec les copains autour d’une bière ou d’un whisky. Autant de choses irracontables sinon par une poignée d’images.

 

Pierre Bordage rejoue Délivrance.

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Joëlle Wintrebert

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Ketty Steward (dont le recueil Connexions interrompues est sorti récemment chez Rivière Blanche).

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Cathy Martin (de la librairie Album de Toulouse) et Jean-Claude Dunyach.

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Roland C. Wagner, qui fêtait la remise du Prix Européen à son roman Rêves de gloire.

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Christophe Duchet (de Fiction et d’Angle Mort) photographie l’expo Dr Grodbort.

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Karim Berrouka et son nouveau trophée, ou l’inverse.

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Justine Niogret, cachée derrière la pieuvre.

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Et une dégustation de Kornog le dernier soir.

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Création en chanson

Pour fêter la rédaction d’une nouvelle conçue en un temps record, ainsi que l’arrivée des Utopiales, un petit numéro musical. Trois acteurs de Dr Who (David Tennant, Catherine Tate et John Barrowman) rendent hommage en chanson aux producteurs Russell T. Davies et Julie Gardner. Pour en saisir tout le sel, les paroles figurent sur la page Youtube.

 

 

 

 

Je repensais à cette vidéo hier soir en commençant la lecture de The Writer’s Tale de Russell T. Davies et Benjamin Cook (sur l’air classique de « Allez, encore une page » avant de s’obliger à reposer le bouquin une heure et demie plus tard). Le livre est né d’un échange de mails censé déboucher sur un article consacré à Russell T. Davies et à la création de Dr Who dont il était alors producteur et scénariste. Deux ans de correspondance plus tard, c’est devenu un pavé passionnant. Outre la curiosité liée au fait de découvrir les coulisses de la série, j’ai été frappée par la sincérité avec laquelle Davies parle de ses difficultés d’écriture et de ses pannes d’inspiration. (Voir le pastiche qu’en fait David Tennant dans la vidéo ci-dessus.) J’aime sa manière de décrire la création d’une histoire non pas comme un processus linéaire, mais comme une suite de déclics qu’il est bien en peine de provoquer volontairement. J’y reconnais forcément beaucoup mon propre rapport à l’écriture. La partie que j’ai lue hier concernait plus particulièrement la genèse de la saison 4 et la création d’une nouvelle compagne pour le Docteur, qu’on voit Davies développer au fil des mails. Personnage finalement remplacé par celui de Donna Noble, que Catherine Tate avait déjà interprété dans un épisode de Noël. C’est amusant et touchant à la fois de voir Davies avouer en substance qu’au lieu d’être en train de développer une intrigue avec des monstres et des rebondissements, il se réjouit d’avoir enfin trouvé le nom de la mère de son héroïne. Car les noms ont une influence non négligeable sur le rapport qu’on entretient avec ses personnages, comme il l’explique très justement : un jour où un producteur a subitement fait changer le nom de l’héroïne d’une autre série sur laquelle il travaillait, il n’a plus jamais été capable de la développer correctement.

 

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D’après ce que j’en ai lu pour l’instant, le livre parle tout autant de ce qui a été créé que de ce qui a été envisagé puis abandonné, car comme le souligne Davies, la création est avant tout une question de choix successifs. Bref, un pavé passionnant qui devrait bien m’occuper demain pendant les deux heures du trajet Paris-Nantes. Rendez-vous aux Utopiales, pour ceux qui y seront !

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"Les Autres"

 

 

 

La tarte à la citrouille fut finalement dégustée devant Les Autres. À la troisième vision, je suis toujours aussi impressionnée par la virtuosité du film d’Alejandro Amenábar. C’est peut-être le plus beau film fantastique que j’aie vu ces dix dernières années. C’est en tout cas l’un des plus denses, et l’un de ceux qui osent aller au bout de cette règle d’or du genre, à mes yeux, qu’est la nécessité d’une logique interne forte.

 

L’histoire des Autres est classique. Dans l’Angleterre de la Seconde Guerre mondiale, Grace vit seule dans un manoir isolé avec ses enfants Anne et Nicholas. Les deux enfants sont atteints d’une maladie qui leur interdit d’être exposés à la lumière ; les rideaux du manoir sont constamment tirés. Trois serviteurs en quête de travail frappent à la porte de Grace. Ils semblent attendre quelque chose. Pendant ce temps, la petite Anne affirme avoir parlé à un autre enfant, Victor, qui habiterait les lieux mais que personne ne voit jamais.

 

C’est la première des deux histoires que raconte Les Autres. L’autre ne se dévoile qu’à partir de la deuxième vision. On pourrait croire qu’il s’agit d’un de ces films qui se reposent entièrement sur une révélation finale et ne prennent pas la peine d’offrir autre chose au spectateur. Or, c’est tout le contraire. J’irai jusqu’à dire que Les Autres ne commence réellement qu’avec le générique de fin. À partir de là, la vision du film ne sera plus jamais la même. Le point de vue adopté change légèrement ; les scènes se chargent de non-dits, les dialogues prennent un double sens qui nous avait échappé jusque là. Je connais peu de films fantastiques qui soient d’une telle finesse dans l’attention portée à ces détails : toute l’histoire se déroule, presque littéralement, entre les lignes. C’est l’histoire d’une maison qui est peut-être hantée, ou peut-être pas. Mais c’est aussi un conte sur le déni et l’acceptation, le secret et la vérité, l’oubli et la mémoire. Dualité symbolisée par le jeu d’ombres et de lumières induit par la maladie des enfants, et tous ces rideaux que l’on ouvre et ferme constamment : on peut vivre caché dans l’ombre ou laisser entrer la lumière, il n’appartient qu’à soi d’en décider.

 

Au cœur de tous ces enjeux, un personnage me touche particulièrement, celui de la petite Anne tiraillée entre deux vérités, deux visions du monde. Tous les personnages sont d’une richesse et d’une complexité remarquables, mais Anne l’est d’autant plus par la position centrale qu’elle occupe : elle est toujours à deux doigts de percer le mystère que sa mère s’obstine à nier, mais elle n’a pas les mots pour le dire. La petite Alakina Mann, qui ne devait pas avoir plus de dix ans à l’époque du tournage, l’incarne avec un aplomb et une finesse impressionnantes. Et puis il y a la Grace de Nicole Kidman, agaçante et poignante à la fois, braquée sur ses principes et refusant d’entendre une vérité qui risque d’ébranler sa vision du monde.

 

Les Autres est sorti il y a tout juste dix ans. On dispose désormais d’assez de recul pour pouvoir affirmer qu’il s’agit d’un authentique chef-d’œuvre du cinéma fantastique.

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